
Les maladies mentales coûtent cher à l’Assurance maladie
la cartographie de la CNAM : Cartographie_des_depenses_et_des_pathologies
Par La rédaction d’Allodocteurs.fr – France Télévisions Mis à jour le 02/06/2017 | 14:35 – publié le 01/06/2017 | 15:4
A quelques semaines de la divulgation des mesures d’économies qu’elle compte réaliser, l’Assurance maladie a passé au crible les dépenses de santé des 57 millions de bénéficiaires du régime général, soit quatre Français sur cinq, entre 2012 et 2015 et réalisé des prévisions d’ici à 2020.
Plus dix milliards d’euros en quatre ans
En quatre ans, le montant de la prise en charge a augmenté de 10,2 milliards d’euros pour atteindre 133,6 milliards en 2015, selon cette étude « médicalisée » qui passe en revue 56 pathologies.
Plus d’un bénéficiaire sur deux a recouru à un soin courant, le reste de la population, soit 26 millions d’assurés, ayant été concerné par des soins liés à des pathologies chroniques, des traitements médicamenteux spécifiques au long cours ou la maternité, relève l’Assurance maladie.
Vieillissement de la population
Les grandes tendances observées depuis 2012 (date du début des analyses médicalisées) se confirment en 2015 avec « un recours important et croissant » aux hospitalisations ponctuelles sans lien possible avec une pathologie spécifique (+335.000 personnes sur quatre ans), souligne-t-elle. La hausse du nombre de ces hospitalisations, qui s’explique par le vieillissement de la population, en fait le premier poste de dépenses (30,7 milliards d’euros).
Autre phénomène confirmé par l’étude, « le poids de la santé mentale » (traitement des maladies psychiatriques ou consommation de psychotropes) avec des dépenses versées à plus de 7 millions de personnes atteignant 19,3 milliards d’euros (soit +2,3% en moyenne chaque année entre 2012 et 2015). « Grâce à ces données (…) nous sommes en train d’expérimenter des prises en charge psychothérapiques pour les épisodes dépressifs légers afin d’éviter le recours aux médicaments », a expliqué lors d’une conférence de presse le directeur adjoint de la direction des statistiques de l’Assurance maladie, Ayden Tajahmady.
Augmentation des maladies psychiatriques d’ici à 2020
La question est d’autant plus cruciale que le nombre de personnes atteintes de maladies psychiatriques devrait augmenter de 11% d’ici à 2020 (soit 246.100 patients en plus).
Troisième poste de dépenses, la prise en charge des cancers s’élevait en 2015 à 14,1 milliards d’euros et couvrait 2,5 millions de malades. En moyenne, 11.400 euros environ par an et par patient ont été remboursés par l’Assurance maladie pour les traitements des cancers en « phase active ». Entre 2012 et 2015 ces dépenses ont augmenté en moyenne de 4% par an, principalement en raison de nouveaux médicaments, précise l’étude. L’Assurance maladie qui pour la première fois a élaboré des projections, estime que le nombre de personnes concernées pour la plupart des pathologies va croître entre 2016 et 2020, mais moins rapidement, du fait « notamment d’une évolution démographique plus modérée ».
Accroissement des pathologies chroniques
D’ici à 2020, 548.000 personnes de plus qu’en 2015 devraient être atteintes d’au moins une pathologie chronique ou être concernées par un traitement au long cours.
Selon les estimations, le nombre de personnes traitées pour du diabète augmenterait de 12% entre 2015 et 2020. En 2020, plus de 4 millions de malades seraient touchés, ce qui « justifie » des actions de prévention de maîtrise des dépenses, souligne l’Assurance maladie. Les maladies cardio-neuro-vasculaires devraient elles aussi concerner 604.000 personnes de plus, mais pour les deux tiers cette augmentation s’explique par un vieillissement de la population.
« Même si on a l’impression d’un tassement (de la hausse du nombre de malades) il s’agit bien de la poursuite d’un accroissement », a souligné le Pr Luc Barret, médecin conseil national de l’Assurance maladie.« La tension persiste sur le système de santé », a poursuivi le professeur expliquant que cette étude devait permettre « d’identifier les leviers de la maîtrise des dépenses », alors que l’objectif national des dépenses de santé (Ondam) qui sert à contenir l’augmentation naturelle de celles-ci, est « en baisse depuis plusieurs années ».
Une étude de l’Assurance maladie met en évidence l’étonnant poids économique des pathologies mentales, dépressions incluses, en France. Une expérimentation va débuter.
Les Français seraient-ils anormalement sujets aux pathologies mentales (dépressions et autres troubles plus profonds) ? L’étude que vient de réaliser la Caisse nationale d’assurance maladie à partir des soins qu’elle rembourse fait en tout cas froid dans le dos et confirme l’existence d’un réel et profond mal-être dans la population.
-
Cela représente 14,6 % des remboursements de l’assurance maladie
Sur les 133,6 millions d’euros de soins remboursés en 2015, l’Assurance maladie en a consacré… 19,3 aux traitements psychiatriques et aux psychotropes. C’est plus que pour le traitement des cancers (14,1 Mds€) ou celui du diabète (6,8 Mds€). Si l’on fait une projection sur les autres régimes obligatoires (MSA, RSI…), le coût de la prise en charge des psychotropes et des traitements psychiatriques atteint 22,5 millions d’euros chaque année en France pour ces pathologies souvent passées sous silence.
«Ce chiffre nous a surpris par son ampleur», rapporte Christelle Gastaldi-Ménager, du département des études sur les pathologies, à la Cnam (Caisse nationale d’assurance maladie), qui n’avance pas de causes. Mais on peut imaginer que la crise sociale et économique traversée depuis 2008 a fait son œuvre.
-
6 millions de Français concernés
Combien sont ces patients de l’ombre ? Sur les 57 millions d’assurés au régime général, 1,8 million ont reçu des soins en 2015 pour «maladies psychiatriques», selon l’étude. Il faut également considérer les 5,3 millions de consommateurs de psychotropes. Sur l’ensemble des régimes, ils sont 6 millions.
La situation semble s’aggraver, selon le docteur Ayden Tajahmady, adjoint à la direction des études et des statistiques de la Cnam. «Entre 2012 et 2015, la dépense a augmenté de 1,3 Md€ », constate-t-il.
-
Les femmes davantage touchées
L’enquête pointe par ailleurs une inégalité devant ce type de pathologies puisque, à 55 ans, par exemple, une femme sur dix consomme régulièrement des psychotropes ; c’est deux fois plus que chez les hommes. Passé 75 ans, 34,8 % des femmes y ont recours contre seulement 22,5 % des hommes.
-
Vers une hausse de 11 % en 2020
L’étude de la Cnam fait une projection à 2020 des pathologies des Français. S’agissant des malades psychiatriques et consommateurs d’antidépresseurs et anxiolytiques, leur nombre va encore grimper de 11 %, soit 246 000 cas supplémentaires. Essentiellement du fait du vieillissement et de l’augmentation de la population française.
-
Une expérimentation mise en place
Cette étude a aussi permis de constater une prise en charge centrée en France sur le médicament, a contrario de nos voisins qui remboursent mieux les psychothérapies.
Une expérimentation va donc être lancée au second semestre 2017 sur trois territoires. Elle visera les patients dépressifs légers qui bénéficieront de la prise en charge de psychothérapies assurées par des psychologues cliniciens, et non des médecins psychiatres (déjà en partie pris en charge).
Le Parisien