Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux
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Réaction du SPH sur la communication en Conseil des Ministres du Plan Psychiatrie et Santé mentale

A l’identique du projet qui l’a précédé, le plan présenté par P. Douste-Blazy en Conseil des Ministres le 20 avril témoigne d’une prise de conscience des grandes difficultés auxquelles se trouve confrontée la psychiatrie, au travers notamment de la reconnaissance :

– de la baisse des moyens infligée à notre discipline depuis 10 ans alors que son activité a contrario a explosé pendant la même période !
– du point de rupture des conditions de l’accueil en hospitalisation et du délabrement d’une grande partie de l’immobilier hospitalier.
– de la nécessité de relancer le développement de l’activité des CMP et d’apporter des moyens nouveaux aux équipes de soin ambulatoire et aux alternatives à l’hospitalisation.
– de l’urgence à mettre en place les établissements médico-sociaux qu’attendent de nombreux patients handicapés psychiques encore trop souvent hospitalisés en psychiatrie.
– de l’insuffisance démographique des praticiens, dénoncée chiffres et pyramide d’âge à l’appui par le SPH depuis une vingtaine d’années ! Si on peut donner acte au ministre de cette prise de conscience bien tardive, que de temps perdu !! et de menaces pour le soin, pour la répartition des moyens et la crédibilité du dispositif sectoriel pour les prochaines années .
– et surtout, pour la première fois depuis longtemps, de la mission fondamentale du secteur dans son rôle de première ligne, de référent et de pilote en matière de réseau santé mentale.

Mais si l’analyse est superposable à celle des professionnels, son appropriation par les pouvoirs publics ne vaut pas quitus. Elle ne pourra être prise au sérieux sans préciser les méthodes, la logique du financement (analyse détaillée des opérations) et les moyens réels de leur mise en œuvre. Une première analyse rapide nous indique combien nous sommes loin d’une budgétisation conforme aux déclarations d’intention.

– les sommes avancées pour la rénovation des locaux hospitaliers demeurent dérisoires face à l’ampleur de la tâche.
– l’augmentation du nombre d’internes est insuffisante pour compenser à terme la chute démographique et surtout rien n’est véritablement prévu pour accroître l’attractivité des carrières hospitalières, ni pour inciter des praticiens à exercer dans les zones déjà déficitaires
– les places envisagées en secteur médico-social sont en nombre beaucoup trop faible.
– la sécurisation des espaces hospitaliers ne fait pas l’objet de mesures financées,
– la situation dramatique de la psychiatrie en milieu carcéral ne saurait attendre d’aussi longs délais pour la mise en place d’unités spécialisées prévues depuis plusieurs années dont les sources de financement ne sont pas clairement définies,
– les dispositions prévues pour les jeunes infirmiers ne sauraient répondre aux besoins d’une véritable formation complémentaire, à même de leur permettre d’accéder à une véritable culture psychiatrique et de les fidéliser au sein de notre discipline.
– et globalement les dispositions financières demeurent toujours très imprécises et très insuffisantes compensant tout juste l’inflation et les retards accumulés. Elles sont en trompe l’oeil agrégeant des mesures en cours de réalisation (les USHA promulguées en 2002) ou déjà annoncées (contenues dans le plan hôpital 2007), des autofinancements à la charge des établissements, des transferts sur les conseils généraux peu mobilisés pour la psychiatrie et le handicap psychique et un éparpillement des ressources financières. Dans une préoccupation très actuelle de transparence de ces affectations financières et de leur traçabilité, seul un budget spécifique pour la psychiatrie est à même de garantir sa bonne dévolution à notre discipline et ses lignes évolutives.

Nous réclamerons donc d’abord au delà des clarifications, la nécessaire montée en charge de l’effort financier annoncé, et les garanties de sa mise en application à la mesure des enjeux perçus désormais par tous .

Note de synthèse du ministère


Le ministre des solidarités, de la santé et de la famille a présenté une communication en conseil des ministres relative à la psychiatrie et à la santé mentale.
La santé mentale est un enjeu majeur de santé publique. C’est aussi un enjeu social considérable, tant la maladie mentale altère le rapport à l’autre.
La France détient le taux de suicide le plus élevé d’Europe pour les personnes âgées, le deuxième pour les adolescents, alors que la consommation des psychotropes y est parmi les plus importantes du monde. Plus de 80 % de ces patients sont pris en charge par des médecins généralistes, et l’offre de soins psychiatriques souffre de cloisonnements entre les différents acteurs, sanitaires, médico-sociaux et sociaux, ainsi que d’une répartition inégale sur l’ensemble du territoire.
Il est nécessaire de donner un nouveau souffle à la politique de psychiatrie et de santé mentale, afin d’offrir une réponse adaptée aux patients, quels que soient leur situation, leur environnement social, leur pathologie ou leur handicap.
Le plan psychiatrie et santé mentale met en œuvre une politique cohérente, structurée et innovante accompagnée d’un effort financier sans précédent, portant à la fois sur le fonctionnement et sur les investissements. Il s’agit non seulement de renforcer l’offre de soins, mais aussi de la réorganiser. Ce plan d’envergure repose sur quatre priorités et plusieurs programmes spécifiques :
Quatre mesures principales répondent aux préoccupations les plus exprimées par l’ensemble des acteurs
Rompre avec le désinvestissement hospitalier, en lançant un programme massif d’investissements pour la psychiatrie sur six ans. 750 millions d’€ d’aides seront dégagés, qui permettront de générer plus de 1,5 milliards d’€ d’investissements supplémentaires. Ce programme a pour ambition de reconstruire, de rénover, de sécuriser et d’humaniser l’offre de soins en psychiatrie, ainsi que d’améliorer les conditions d’accueil des patients et de travail des professionnels.
Rompre avec le désengagement de l’hospitalisation complète dans les prises en charge, en assurant simultanément le renforcement de l’hospitalisation complète et le développement des alternatives à l’hospitalisation et de l’offre de soins ambulatoires (hôpital de jour, de semaine ou de nuit, centres médico-psychologiques). Ce sont 140 millions d’€ qui y contribueront jusqu’en 2008. Le nombre d’internes en psychiatrie augmentera de 245 à 300 par an ;
Améliorer la formation des infirmiers en psychiatrie, notamment par la mise en place d’une formation d’adaptation à l’emploi et d’un dispositif de « tutorat – compagnonnage » durant la première année d’exercice. 25 millions d’€ par an seront consacrés à ces améliorations de la formation ;
Développer l’offre médico-sociale en créant 1 900 places d’accompagnement à domicile, 1 000 places d’hébergement et 300 “clubs” lieux d’entraide mutuelle, grâce à un effort de 86 millions d’€ en trois ans.

A ces mesures s’ajoutent plusieurs programmes spécifiques dont :
• Mieux prendre en charge la dépression et lutter contre le suicide ;
Renforcer la sécurité des établissements psychiatriques publics et privés ainsi que leurs abords, par la mise en place d’un protocole entre le ministère des solidarités, de la santé et de la famille et celui de l’intérieur et des libertés locales;
Créer des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA), afin de prendre en charge les détenus souffrant de troubles mentaux hors du milieu pénitentiaire, grâce à un financement dédié et supplémentaire ;
Adapter la formation des internes en psychiatrie et renforcer la formation initiale en psychiatrie des internes en médecine générale ;
• Mettre en place de projets de psychologie clinique dans les structures hospitalières et créer des masters de psychologie clinique et thérapeutique avec les professionnels et l’université.
Faire évoluer l’image de la maladie mentale et des troubles psychiques au sein de la population par une campagne d’information grand public.

Au total, ce plan bénéficiera de plus d’un milliard d’euros
• en investissements, de 750 millions d’€ d’aides entre 2006 et 2010, permettant de générer un investissement supplémentaire de 1,5 milliard d’€ ;
• en fonctionnement de 287 millions d’euros de 2005 à 2008.