Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux
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L’impact de l’allongement de l’espérance de vie, qui s’accompagne d’un accroissement du nombre de personnes souffrant de troubles mentaux, fait de la prise en charge des troubles psychopathologiques du sujet âgé un enjeu majeur de l’organisation de l’offre de soins.

D’après les études menées par l’Organisation Mondiale de la Santé, les troubles mentaux constituent l’une des premières causes de morbidité chez le sujet âgé et ils représentent les 3/5èmes des sources d’incapacité liées au vieillissement. Une étude réalisée en 2003 (étude ESPRIT) met en évidence l’importance de la prévalence de ces troubles chez les plus de 65 ans : 6,2% pour l’anxiété généralisée et 3,1% pour la dépression majeure. Face à cet enjeu majeur de santé publique, l’accessibilité aux soins des sujets âgés présentant des troubles psychopathologiques paraît encore insuffisamment développée en France, qui est classée par l’OMS en 18ème position mondiale en terme de structures et d’organisation de soins en psychiatrie de la personne âgée.

L’objectif d’améliorer la réponse aux besoins en santé mentale des personnes âgées anime à la fois les réflexions nationales menées dans le cadre du plan « Psychiatrie et santé mentale (PPSM) » 2005-2008 et dans le cadre de l’amélioration de la filière de soins gériatriques. Le PPSM comme la circulaire n° 117 du 28 mars 2007 relative à l’amélioration de la filière de soins gériatriques, comprenant la définition de référentiels d’organisation des soins, s’inscrivent dans une logique d’articulation entre les différents acteurs des champs sanitaire, social et médico-social, permettant d’assurer la continuité des soins, conformément aux préconisations du plan solidarité grand âge.

Le caractère prioritaire de la prise en charge des sujets âgés présentant des troubles psychiatriques a été réaffirmé dans les volets « psychiatrie et santé mentale » et « personnes âgées » dans les schémas régionaux d’organisation des soins de troisième génération (SROS 3).

L’objet de la présente circulaire, qui fait suite à l’audition de plusieurs équipes ayant déjà développé une organisation spécifique pour assurer la prise en charge des troubles mentaux des personnes âgées, est de définir les grands principes généraux qui participent à la mise en œuvre d’une prise en charge adaptée et coordonnée des sujets âgés présentant des troubles psychiques, et à soutenir – dans le cadre d’un appel national à expérimentation doté d’un financement en dotation annuelle de financement d’un montant total de 2 millions d’euros pour la période 2007/2008 – des projets de structuration de dispositifs de prise en charge psychiatrique des personnes âgées.

1 – Les objectifs poursuivis par l’expérimentation.

Le plan psychiatrie et santé mentale s’est donné comme objectif de répondre de façon globale aux besoins de santé mentale des personnes âgées dans le cadre d’une prise en charge coordonnée. L’expérimentation vise à financer des projets innovants susceptibles de répondre à cet objectif. Ne sont éligibles au financement prévu par appel d’offres que les établissements disposant d’une activité de soins en psychiatrie et qui disposent d’un financement en dotation annuelle de financement. Les projets concernés pourront porter sur deux types de demandes :
– les demandes des établissements de psychiatrie organisant une prise en charge in situ des troubles psychiatriques des sujets âgés souffrant de troubles psychiques, dans un cadre sectoriel, intersectoriel ou non sectorisé.
– les demandes présentées par des établissements de psychiatrie au bénéfice de services de gériatrie intervenant dans le cadre d’une filière gériatrique et sollicitant le renforcement de leur composante d’activité psychiatrique, sous la forme d’une équipe mobile de psychiatrie du sujet âgé. Cette disposition implique l’existence d’une convention entre l’établissement psychiatrique à laquelle est attachée l’équipe mobile et les établissements recevant des personnes âgées qu’elle dessert.

La réalisation d’une expérimentation nationale sur ce thème permettra d’apporter un soutien financier aux projets menés dans cette perspective.

2 – Les modalités de pilotage et de mise en œuvre de l’expérimentation.

a – La déclinaison de cette priorité dans la mise en œuvre de la planification régionale.

Les projets doivent être cohérents avec les volets psychiatrie et santé mentale et personnes âgées des SROS 3, comme le précise la circulaire précitée du 25 octobre 2004 et avec le fonctionnement des filières gériatriques (circulaire n° 117 du 28 mars 2007).

b – L’organisation de l’allocation de ressources pour l’accompagnement de cette priorité.

Les moyens dédiés à cette priorité dans le cadre du PPSM sont des crédits d’assurance maladie pérennes, au titre de l’objectif national des dépenses hospitalières d’assurance maladie (ODAM), destinés au soutien des établissements de santé psychiatriques supports de ces projets. Afin d’abonder vos dotations régionales au plus près des besoins de financement correspondant aux priorités établies dans le cadre des SROS, la répartition des moyens sera réalisée sur la base d’un appel d’offres national. Les financements permettront la création de nouveaux dispositifs de prise en charge et non le renforcement de structures psychiatriques existantes. Les projets pourront, le cas échéant, être élaborés avec les projets de gériatrie et les financements être mutualisés notamment pour ce qui concerne la mise en place d’équipes mobiles mixtes. Vous trouverez ci-joint en annexe les orientations relatives à la prise en charge des personnes âgées souffrant de troubles psychiques, que vous veillerez à diffuser aux établissements susceptibles de répondre à l’appel d’offres. Vous voudrez bien faire part au bureau O2 de la DHOS (bureau de l’offre régionale de soins et des populations spécifiques) du projet retenu voire d’un second projet, accompagnés d’un avis circonstancié.

c – L’évaluation de l’expérimentation.

Compte tenu du caractère encore novateur de ce type de prises en charge, l’évaluation des dispositifs mis en place sera essentielle. Il est demandé à chaque responsable de projet de proposer des indicateurs d’évaluation qui seront transmis annuellement à la DHOS. Ces données accompagnées d’un état annuel d’avancement des projets seront notamment étudiées par le comité national de suivi du plan psychiatrie et santé mentale. Sur la base de ces données, et à l’issue des deux années d’expérimentation, un bilan national du fonctionnement des projets soutenus sera réalisé et permettra de préciser les orientations nationales à donner en matière de prise en charge des sujets âgés souffrant de troubles psychiques, tant par la psychiatrie avec l’appui des gériatres que par la gériatrie avec le concours des équipes psychiatriques.

d – Le calendrier de l’expérimentation.

Avril 2007 : Lancement de l’appel à projets.
Les dossiers devront impérativement être adressés par courrier électronique et par voie postale avant le 1er juin 2007.

A l’attention d’Isabelle MATHURIN
Adjointe au Chef du bureau O2
DHOS
Tel : 01.40. 56. 43. 16.
Mail : isabelle.mathurin@sante.gouv.fr

Pour le Ministre et par délégation
Annie PODEUR
Directrice de l’hospitalisation Et de l’organisation des soins

Annexe : Orientations relatives à la prise en charge des sujets âgés souffrant de troubles psychiques

1 – La complexité et la spécificité du diagnostic.

Le diagnostic des troubles mentaux des personnes âgées est souvent complexe à établir sous l’effet de plusieurs phénomènes : manifestation atypique des troubles, expression somatique d’une pathologie psychiatrique, difficulté de différencier des troubles du comportement liés à une forme d’entrée de pathologies neuro-dégénératives, de type Alzheimer par exemple, d’un début de maladie psychiatrique….. Il doit par conséquent être assuré par un professionnel psychiatre. Compte tenu de l’intrication fréquente des troubles psychiques et somatiques, ce diagnostic des troubles mentaux doit néanmoins être coordonné avec la réalisation d’un diagnostic des troubles somatiques par un médecin gériatre.

2 – La réponse en termes d’organisation des soins.

Compte tenu de l’intrication forte entre les dimensions somatiques et psychiatriques des besoins, l’organisation de la prise en charge des sujets âgés doit répondre au principe de gradation des soins et d’articulation des compétences et savoirs faire. L’enjeu est d’organiser une coordination des interventions des différents acteurs de la prise en charge, dans le respect de leur cadre d’intervention et champ de compétences spécifiques, sans donner lieu à confusion de leurs rôles respectifs.

a- La gradation nécessaire de l’offre de soins.

Le médecin généraliste est l’acteur de première ligne de cette prise en charge, intervenant dans la coordination et le suivi des actions thérapeutiques. Néanmoins, les patients dont la situation le nécessite doivent bénéficier du recours à une équipe pluriprofessionnelle (psychiatre, gériatre, psychologue, infirmière etc.), chargée d’évaluer les affections, d’orienter les choix thérapeutiques et de guider le suivi. Selon le degré de complexité des troubles, la prise en charge doit être assurée soit à partir de la filière gériatrique (notamment pour prendre en charge les troubles du comportement des personnes âgées souffrants de démence de type maladie d’Alzheimer), soit à partir de services de psychiatrie ayant développé une connaissance de la psychiatrie des personnes âgées lorsque les troubles psychiatriques sont plus importants ou témoignent d’une phase de décompensation. Dans les deux cas, il est indispensable de disposer de compétences plurielles (gériatrique et psychiatrique). Le mode de prise en charge proposé doit lui aussi être gradué, en fonction des spécificités du patient (nature et stade de la pathologie, environnement social et psychoaffectif du patient, etc.). Si le traitement ambulatoire doit être privilégié, éventuellement complété, par un suivi à domicile réalisé par l’équipe psychiatrique du secteur, il apparaît souhaitable de disposer, à terme, dans chaque région, de petites capacités d’hospitalisation psychiatriques à temps complet dédiées à la psychiatrie du sujet âgé, en particulier pour assurer une évaluation diagnostique, un bilan pré thérapeutique et une surveillance du traitement.

b- La place de la psychiatrie dans la prise en charge de ces troubles.

Compte tenu de la spécificité du diagnostic et des traitements psychiatriques, la prise en charge des sujets âgés requiert l’intervention de professionnels de la psychiatrie expérimentés à ces modalités, capables d’assurer une prise en charge directe des patients dont l’état le nécessite mais aussi d’apporter un appui aux professionnels intervenant dans le suivi et l’accompagnement des personnes âgées, sous forme de formations et/ou d’échanges autours de la pratique.

c- L’organisation d’une coopération formalisée entre les différents acteurs.

L’amélioration de la prise en charge des pathologies psychiatriques du sujet âgé passe par la coordination de l’ensemble des interventions des acteurs sanitaires, médico-sociaux et sociaux.

Compte tenu du caractère souvent polypathologique des troubles du sujet âgé, la coordination des compétences psychiatriques et gériatriques constitue un élément déterminant de la qualité de la prise en charge des personnes âgées souffrant de troubles psychiques. Cette collaboration peut prendre des formes diverses : consultations pluridisciplinaires du sujet âgé, réseaux associant les gériatres et les psychiatres, équipes mobiles services de psychiatrie du sujet âgé…

Le personnel soignant doit être formé et au minimum sensibilisé à cette pratique de prise en charge.

3 – Le cadre souhaitable de l’intervention de cette prise en charge psychiatrique.

L’organisation de lieux spécifiés de prise en charge (attention portée à l’architecture ou aux circuits de circulation) est essentielle à la qualité de réalisation de cette activité et à la perception qu’elle génère auprès des sujets âgés eux-mêmes et de leurs familles. La prise en charge des patients doit être assurée dans le cadre de projets de soins individualisés et formalisés, et qui permettent d’adapter régulièrement les approches thérapeutiques au regard de l’évolution de la situation des personnes. L’organisation des soins doit permettre d’assurer une réelle pluridisciplinarité de la prise en charge du patient âgé, notamment par la réunion régulière des compétences médicales dans un « staff » commun.

Textes de référence :

Circulaire DHOS/ O2/ n° 117 du 28 mars 2007 relative à l’amélioration de la filière de soins gériatriques.
Circulaire DHOS/O2/2004/507 du 25 octobre 2004 relative à l’élaboration du volet psychiatrie et santé mentale du schéma régional d’organisation sanitaire de troisième génération.
Annexe : orientations relatives à la prise en charge des sujets âgés souffrant de troubles psychiques.