Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux
Sélectionner une page

Nicolas Sarkozy le veut, Rachida Dati le fait.

Le SPH dénonce le projet de loi du Garde des Sceaux transmis au Conseil d’Etat relatif à la rétention de sureté et la culpabilité civile. Il s’agit d’instaurer une privation supplémentaire de liberté en hôpital pénitentiaire après la peine pour les criminels « dangereux », de revenir sur les conditions de l’irresponsabilité pénale et de supprimer le secret médical en prison.

Après l’émotion politiquement entretenue suscitée par les affaires Evrard et Dupuy, c’est un nouvel exemple de réforme jetée en pâture à l’opinion publique, et conduite dans la précipitation d’une communication politique, au mépris des règles du droit, de la déontologie et des pratiques des professionnels de santé.

Rien ne légitime cette véritable double peine que représente l’enfermement sanitaire après la prison : soit il s’agit de malades dangereux relevant d’une mesure de sureté et de soins pour lesquels la sanction pénale, actuellement dépourvue de l’accompagnement psychiatrique minimum nécessaire, n’avait pas de sens, soit il s’agit de criminels ayant purgé leur peine qui ne peuvent être condamnés à une mesure sanitaire privative de liberté.

Si aujourd’hui l’objectif est bien de parvenir à une réforme globale de la législation des interactions judiciaires et sanitaires, incluant notamment la réforme de la loi de 90, ces réponses au coup par coup viennent aggraver une situation déjà alarmante. L’impact mis sur les mesures de rétention et de sureté ne trouve nulle part la contre partie nécessaire dans l’organisation des mesures de prévention et de soins et le développement de leurs moyens.

Quant à l’organisation d’un théâtre de l’émotion, censé répondre aux besoins des victimes, il fragilise dangereusement l’équilibre du procès pénal. Si le respect des droits des victimes au civil mérite d’être facilité, ce ne peut être au prix de la construction d’un concept de culpabilité civile des malades mentaux jugés médicalement irresponsables. Irresponsables et coupables !
Ce n’est pas non plus en entretenant la défiance vis-à-vis des positions des experts psychiatres prononçant l’irresponsabilité que l’on peut espérer faire progresser la justice.

Comment peut-on rendre la justice, dire le droit, faire des lois sans respecter un minimum de temps et de distance face aux évènements et à l’opinion ? Ce temps et cette distance conformes à l’expérience et à l’éthique de notre société, semblent faire cruellement défaut aujourd’hui.